Terre

Je pense peinture, matière, terre. Parvenir à se détacher du quotidien pour un duel avec l’argile. Ces nuits où je lutte avec le sommeil, mue par la volonté de créer. Et puis rien. Car l’heure du réveil approche et les impératifs du quotidien s’imposent. Etre en forme pour travailler. Gagner du temps, toujours et encore.
Les croquis et les mots s’entrechoquent dans mon petit carnet. Avortement d’idées.
Et puis répondre aux messages que vous me laissez. Envie de jaune sable, d’ocre et de patine qui glissent sous les doigts. Besoin de toucher le froid d’un marbre. Blanc zébré le marbre. Ou bien glisser encore ma main sur le grain de ciment de ce mur de métro en travaux, sentir cet humide compact et terreux et ces pierres odorantes de cave ou d’église. Souvent aussi, cette envie irrésistible d’effleurer les cheveux dans le bus. Souvent à deux doigts de ces mèches hétéroclites, matières vaporeuses, ou bien lisses, cotonneuses, rebelles, denses, bouclées, timides, sèches, libres. J’ai cette amie nigériane : j’aime faire rebondir lentement ma paume sur sa chevelure, sentir la résistance, le ressort. Et cette fille dans le bus aujourd’hui : un blond frisé très dense, mi long. Atypique et probablement naturel. A vue de main, j’évalue le poids de sa chevelure en entier.
Et je marche la nuit dans le noir, voir les choses avec mes mains.